Adoption du projet sur la protection des sources (AP | 16.05.2008 | 00:18)

Les députés ont adopté jeudi 15 mai en première lecture le projet de loi sur la protection des sources des journalistes dans un contexte tendu par les récentes critiques de Nicolas Sarkozy et de ses proches contre les médias. La gauche, jugeant ce texte insuffisant, a voté contre. Ce texte attendu depuis plusieurs années par les journalistes, promis depuis 2006 par le gouvernement, aurait pu faire consensus. Son objectif est de garantir une "véritable protection aux journalistes", alors que la législation française est très insuffisante dans ce domaine. La France est régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) pour des poursuites contre des journalistes qui avaient refusé de révéler l'identité de leurs informateurs. Plusieurs perquisitions dans des entreprises de presse ont mis en avant la nécessité d'une définition précise de la protection des sources, pierre angulaire de la liberté de la presse.

Le texte présenté aux députés par le garde des Sceaux Rachida Dati complète la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de le presse en précisant que "le secret des sources des journalistes est protégé afin de permettre l'information du public sur des questions d'intérêt général". La justice ne pourra rechercher l'origine d'une information de presse que lorsqu'un "impératif prépondérant d'intérêt public" l'impose, à titre exceptionnel, en cas de crime ou délit grave et si cela est absolument nécessaire à l'enquête. Le texte protège davantage les journalistes en cas de perquisition. Les perquisitions dans les agences de presse et au domicile des journalistes devront être effectuées par un magistrat. Le journaliste pourra s'opposer à la saisie d'un document.

La gauche, relayant les critiques des syndicats de journalistes, a dénoncé "l'imprécision" de ce texte "inapplicable et régressif", selon Aurélie Filipetti (PS). Le projet "ne précise nullement ce qu'est une source ni qui sont les personnes protégées", a estimé l'oratrice socialiste, pour qui les dérogations laissent la porte ouverte à "l'arbitraire des juridictions".

Le texte a été examiné dans un climat tendu par les attaques de Nicolas Sarkozy contre certains médias la semaine dernière devant les parlementaires de la majorité, et par la polémique entre le porte-parole de l'UMP Frédéric Lefebvre et l'Agence France Presse (AFP), accusée de n'avoir pas repris un communiqué sur la condamnation de Ségolène Royal pour ne pas avoir payé deux anciennes attachées parlementaires. Absente lors du débat, la ministre de la Culture Christine Albanel est allée jusqu'à évoquer la création d'un nouveau service de l'agence dédiée à la diffusion de communiqués...